jeudi 20 décembre 2007

L’ABC du conseil de gestion à l’exploitation agricole

Expliquer en quoi consiste ton travail, ce n’est pas facile! Les gens impliqués dans Ingénieurs sans frontières en savent quelque chose! Ce n’est pas évident de décrire notre organisation, ce qu’on fait, notre approche surtout et notre impact outre-mer. J’ai la même difficulté quand je viens à expliquer le travail de la cellule avec laquelle je travaille ici à Ouahigouya, dans l’ONG la Fédération Nationale des groupements Naam. Pour ceux qui veulent connaître mieux l’organisation, j’ai déjà écrit un peu là-dessus, vous pouvez aller voir ça. Comme des gens m’ayant précédé l’ont déjà très bien décrit, je vais reprendre quelques passages (en italique) en y ajoutant mes commentaires.

Comme je le disais, le conseil de gestion aux exploitations agricoles (CdG) permet aux producteurs d’avoir une image sur la rentabilité de son travail et de prendre des décisions d’orientation sur leurs exploitations agricoles en vue d’augmenter leur revenu et de contribuer à l’amélioration des conditions de vie. Il se base sur des étapes d’enregistrement de données, d’analyse des résultats, de prévision et de suivi.Le conseil inclut une dimension d’aide à la décision pour le paysan ce qui implique de comprendre les caractéristiques de son exploitation et la façon dont il prend ces décisions.

Il faut d’abord comprendre ce qu’est une exploitation agricole. C’est un système complexe avec différents éléments (les cultures, les troupeaux, la force de travail, le grenier etc.) en interaction avec son milieu (sol, climat, etc. La façon de prendre une décision sur exploitation est différente selon chacune d’elles.

Les décisions des paysans s’expliquent par les objectifs qu’ils poursuivent et par les moyens dont ils disposent. Toutefois, ces décisions sont prises alors qu’ils ne disposent pas ou peu d’informations sur le climat de la campagne à venir, les prix des produits agricoles au moment des prochaines récoltes, les techniques proposées par la recherche ou disponibles dans d’autres régions, etc. Mais aussi car ils n’ont qu’une information imparfaite sur leur propre exploitation (le rendement des différentes parcelles, l’impact d’une technique sur la production, les marges obtenues pour chaque culture, etc.)

Le conseil à l’exploitation n’a donc pas pour but de modifier ce processus mais de le rationaliser et de le rendre plus explicite. Sans conseil, le paysan prendra de toute façon une décision. Dans le cadre d’une démarche de conseil, il prendra probablement une décision plus réfléchie car il sera incité à formaliser sa réflexion, à discuter des intérêts et des inconvénients de ses choix avec ses voisins et le conseiller.

Le conseil à l’exploitation fait partie des services à l’agriculture, comme l’approvisionnement en intrants, le crédit, l’appui à la commercialisation, la recherche, la formation des producteurs, etc.. Il génère des effets directs et indirects intéressant un grand nombre de familles paysannes comme :


-L’amélioration des résultats des exploitations : le CdG débouche sur une amélioration des pratiques agricoles, et en ce sens représente une contribution à la vulgarisation agricole et une meilleure allocation des moyens de production disponibles. Les impacts du conseil dépassent le cadre des seuls participants qui sont souvent des leaders d’opinion dans leur milieu. Les informations, les techniques, les normes sont véhiculées à travers les réseaux socio-professionnels qui existent en milieu rural. Le CdG a un effet d’entraînement dans la communauté. Pour un producteur qui apprend comment traiter les maladies par exemple, c’est tout le site qui en profite.

-La participation à une démarche de conseil développe leurs capacités de gestion comme savoir gérer les diverses activités mais aussi ses revenus, bien gérer les ressources collectives de la famille (terre, travail, capital) que la maîtrise des outils (remplir de fiches ou le carnet d’exploitation, etc.). Le CdG leur fait prendre conscience de leur statut d’acteur disposant d’une marge de manœuvre pouvant construire son avenir. Il renforce le sentiment d’auto-estime nécessaire pour libérer les énergies et affronter les défis.

Il prolonge et renforce les actions d’alphabétisation et post-alphabétisation et donne l’envie aux membres de mieux maîtriser l’écrit et le calcul. Il constitue une application concrète quotidienne des enseignements de base.

Ceci résume assez bien l’idée du Conseil de gestion (CdG). Mais concrètement, qu’est-ci qui se passe sur le terrain ? Prenons un exemple concret. D’abord, un producteur doit s’intéresse au Conseil de gestion et devenir adhérent. Il y a donc de la sensibilisation des groupes de producteurs à la démarche CdG dans l’objectif de susciter le volontariat, car ces derniers payent donc une cotisation lui assurant un suivi par le conseiller. Cette activité concerne tous les producteurs des groupements et unions du même site (adhérents ou non) et toutes personnes intéressées par le CdG. Elle se fait au cours de rencontres collectives spécifiques, de façon individuelle et de manière occasionnelle (AG unions, radio, presse, etc.). Lors de la séance de sensibilisation, le conseillers présente aux producteurs présents les objectifs et finalités du CDG ; les avantages, inconvénients et compétences ; les critères d’adhésion ; le déroulement des activités et la présentation des outils ; les domaines concernés par le CDG ; les acteurs impliqués dans la gestion de la démarche et leurs rôles. Des témoignages d’anciens adhérents et du membre du COCdG complètent l’exposé du conseiller.
Il y a formation des volontaires ayant adhérés à la démarche, à l’utilisation des outils de collecte des données.


Un conseiller visite ensuite plusieurs producteurs sur leurs parcelles à toutes les deux semaines. Ils discutent ensemble des itinéraires techniques, des problèmes ponctuelles qui surviennent, le traitement des maladies, etc. Le conseiller s’assure également que toutes les dépenses et les revenus sont enregistrés dans le cahier de l’adhérent. Ce suivi-conseil concerne prioritairement les adhérents et touche indirectement les non adhérents qui profitent du passage du conseiller ou de la cellule pour avoir des conseils dans les domaines techniques et économiques.
Le conseiller fait ensuite les calculs permettant par la suite de restituer les résultats aux producteurs (marge brute, rendement, dépenses…)


Il y a ensuite restitutions individuelles des résultats et/ou collectives (sur demande des adhérents du groupe) par le conseiller avec l’appui des agronomes. On lui remets par écrit les résultats et on discute avec de recommandations afin qu’il s’améliore l’année suivante. On peut proposer une amélioration du rendement par de meilleures techniques agricoles, une meilleure commercialisation par une planification des cultures, ou simplement un meilleur contrôle des dépenses. Le conseil dépend de la situation du producteur, de ses besoins, mais surtout du changement que le producteur est prêt à accepter (ce qui n’est facile à identifier !). Les producteurs passent ensuite à la prévision pour la campagne suivante. Cela permet d’évaluer les dépenses nécessaires et aussi de valider les recommandations faites auparavant.
Pendant la saison, le dispositif de Conseil de gestion offre sur demande des formations spécifiques, organise des rencontres débats sur des thèmes et problèmes techniques.
Finalement, le Bilan Annuel est une occasion de rassembler plus du quart des 400 producteurs adhérents pour faire une présentation collective des résultats de partout au Burkina.
Ici, la plupart des producteurs font suivre leur production maraîchère, c’est-à-dire les légumes. Pourquoi les producteurs se restreignent seulement à une culture alors qu’ils pourraient considérer également toutes les activités faisant vivre la famille ? Et bien ça c’est une question difficile que je ne détaillerai pas ici. Les intéressés peuvent se manifester et je ferai une entrée à ce sujet si els gens le désirent.

En résumé, pour les visuels, le CdG c’est :




Comme rien n’est parfait dans la vie, il y a des aspects qui font en sorte que la portée et la qualité du conseil peuvent être diminuées. La question que je vous pose est donc :
Qu’est-ce que vous aimez dans le dispositif de conseil de gestion comme méthode de développement ?
Et aussi quels aspects (quels qu’ils soient) peuvent affectés l’ampleur et la qualité du conseil comme moyen de développement des populations rurales ? Quels sont les défis reliés à ce moyen de développement ?
En ayant votre opinion, on va pouvoir débattre des bons et des mauvais points que VOUS aurez identifiés. En espérant que ça rende la discussion intéressante ! Le débat se fera dans la section commentaire. Partagez votre opinion ! Et même si c’est juste pour poser une question, allez-y ! Ça va animer la discussion j’en suis sûr !

Source :
L’UNITE D’APPUI AGRO-ECONOMIQUE
Le Conseil à l’exploitation familiale à la FEDERATION NATIONALE DES GROUPEMENTS NAAM (F. N. G. N.), Outils et méthode, Burkina Faso Mai 2006

Guy Faure, Patrick Dugué, GUIDE PRATIQUE SUR LE CONSEIL A L’EXPLOITATION FAMILIALE : EXPÉRIENCES EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE

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